Solidaires, CGT et FO, qui représentent ensemble 50, 2 % du personnel de la fonction publique (hors divers non représentatifs) ont rejeté le protocole PPCR. Les syndicats CFDT, CFTC, UNSA, FA-FP et FSU (49,8 %) se sont déclarés quant à eux favorables à l’accord.
Dès lors, le protocole d’accord PPCR, rejeté par des organisations représentant la majorité du personnel, ne peut s’appliquer (article 1er de la loi du 5 juillet 2010 sur le dialogue social dans la fonction publique).
Le 30 septembre, Mr Valls et Mme Lebranchu ont pourtant décidé de le passer en force, sans respect aucun de la démocratie sociale ni de la loi, traitant au passage les organisations non signataires d’irresponsables. Cerise sur le gâteau, la Ministre a annoncé son intention de mettre en place le comité de suivi de ce protocole PPCR invalidé (n’ayant pas recueilli pas la majorité), en ne l’ouvrant qu’aux signataires !
Le gouvernement enterre ainsi la politique de contractualisation des rapports sociaux dont il se fait pourtant le chantre.
La longue et difficile négociation PPCR qui a duré un an, au travers de 25 réunions, n’a jamais abouti qu’à une écoute toute relative, sans prise en compte des revendications de Solidaires, au point que nous nous sommes interrogés, à l’issue du dernier trimestre 2014, sur l’utilité et l’opportunité de continuer ces négociations.
Nous avons pourtant décidé de les poursuivre, afin de porter jusqu’au bout les revendications des agents.
La Ministre n’avait-elle pas affirmé dans son discours d’ouverture des négociations, le 1er juillet 2014, sa volonté de dialogue social, en déclarant : « pour atteindre notre objectif - renforcer et moderniser la fonction publique de carrière - une seule méthode est possible : celle du dialogue social et des engagements réciproques. Il s’agit donc de s’appuyer sur les propositions du gouvernement et sur les vôtres afin de rénover en profondeur notre modèle de fonction publique et d’en assurer la pérennité, afin aussi d’apporter un meilleur service à nos concitoyens ».
Force est de constater que la Ministre n’a pas respecté ses engagements, et foulé au pied la démocratie sociale.
LES QUESTIONS QUE POSENT LE PROTOCOLE PPCR
De manière générale, les évolutions d’indices des nouvelles grilles du protocole PPCR pour les années 2017-2020 sont particulièrement faibles (moins de 6%) et ne permettent pas de couvrir l’inflation (7,5%) subie par les agents sur la période 2010-2015. Or, les agents publics se smicardisent : le traitement indiciaire de plus d’un million d’entre eux est voisin du SMIC, et c’est particulièrement vrai pour la catégorie C, qui est pourtant la grande perdante de la « rénovation des grilles » opérée par PPCR !
PPCR fait perdre de l’ancienneté aux agents, lors du reclassement dans les nouvelles grilles. Les carrières sont ralenties. Ceci est dû à l’allongement de la durée de carrière intégrée dans les nouvelles grilles.
Parfois même, des agents subissent des inversions de carrière, notamment au sein des catégories C et B. Solidaires a interpellé la Ministre par lettre du 2 juillet 2015 sur ces situations inadmissibles et injustes.
Exemple : agent de catégorie C recruté le 01.01.15 dans l’échelle 4 de rémunération. Cet agent justifie de 10 ans de services effectués dans le privé. Il est donc prévu d’en tenir compte pour moitié lors de son intégration dans la Fonction Publique (article 5 du décret N° 2005-1128). Au 1er janvier 2017, cet agent aura donc atteint, dans l’échelle 4, le 5ème échelon avec une prise de rang au 1er janvier 2016 (soit sept années d’ancienneté dans l’échelle 4). Il sera reclassé au 3ème échelon de la nouvelle grille C2 avec un an d’ancienneté dans cet échelon, soit une prise de rang au 1er janvier 2016 (équivalant à quatre années d’ancienneté dans la carrière). Un autre agent, justifiant des mêmes services dans le privé, est recruté le 1er janvier 2017 dans la nouvelle carrière. Il sera donc intégré directement à l’échelle 5 de rémunération et classé au 4ème échelon de la nouvelle grille C2, qui est atteint au bout de 5 ans d’ancienneté. Conséquence : à situation égale, l’agent recruté en 2017, soit deux années après son collègue recruté en 2015, sera mieux classé dans la nouvelle grille C2 et justifiera d’une année supplémentaire d’ancienneté.
Le calendrier d’application, très étalé dans le temps (jusque 2020) dilue le gain financier issu des nouvelles grilles. Il rend également incertain son obtention car il dépend des décisions politiques du prochain gouvernement, les élections ayant lieu en 2017. Ce qu’un gouvernement fait, un autre peut le défaire.
Aucune correction des inégalités n’est réalisée dans le protocole.
Les inégalités entre catégories (notamment entre A+ et A++ et les autres), ne sont pas corrigées, les inégalités F/H et entre versants non plus.
Les petites revalorisations, très vite rattrapées par les cotisations retraite, sont autofinancées par les agents eux-mêmes, et seront éventuellement par le prochain gouvernement ! Aucun budget n’a été dégagé par la Ministre, qui ne disposait que de très peu de marges de manoeuvre. A plusieurs reprises, Solidaires l’a interpellée sur ce sujet sans réponse de sa part. Le financement (peu onéreux) des nouvelles grilles est opéré pour une bonne part par une conversion primes/ points de très faible ampleur : moins de 2% du traitement et par la suppression de l’indemnité compensatrice de la CSG (IECSG).
Le protocole PPCR est loin de se réduire à la seule question des grilles et rémunérations. Il s’agit aussi « d’adapter la fonction publique aux évolutions de l’action publique »
Le protocole PPCR développe la mobilité (mobilité interministérielle au sein du versant Etat avec notamment l’extension des CIGeM-corps interministériels à gestion ministérielle, les fusions de corps, les statuts trans fonction publique, les mesures « d’attractivité du territoire », le tout associé à une « simplification » de la gestion du personnel et du rôle des CAP qui masque mal la montée de l’arbitraire.
L’application programmée de janvier 2015 jusque 2018 de la réforme territoriale et de l’aménagement territorial de l’Etat trouvent ici leurs outils de mise en oeuvre. S’y ajoute la déconcentration de la gestion du personnel (Charte de la Déconcentration publiée par décret le 8 mai 2015, malgré l’avis défavorable du CSFPE). Pour Solidaires, les fonctionnaires ne sont pas interchangeables, il faut respecter les identités professionnelles. Par ailleurs Solidaires est favorable à la mobilité choisie dans les versants de la fonction publique, avec une solide formation professionnelle permanente à l’appui.
PPCR prévoit également la réforme de l’évaluation. Les propositions faites ne pourront que renforcer l’arbitraire. L’entretien d’évaluation pourrait bien aboutir à n’accorder qu’à une minorité d’agents (25%), une réduction importante (8 mois) afin de « motiver » davantage les agents et mieux « récompenser » les plus performants.
Le RIFSEEP, dispositif indemnitaire fonction publique intégrant toutes les indemnités et primes, avec une part modulable, parachèvera le tout. Solidaires revendique au contraire le respect du principe d’égalité de traitement des fonctionnaires.
Solidaires enverra une adresse au 1er Ministre pour l’interpeller sur sa manière étrange de traiter la démocratie sociale.
Solidaires appelle donc à la mobilisation.
Participez aux manifestations et rassemblements du 8 octobre !
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