Les syndicats de Solidaires en Occitanie dont les syndicats SUD-Collectivités Territoriales Solidaires Tarn et Solidaires Haute-Garonne
Les représentants de Solidaires au CESER Occitanie : Anne Rose LE VAN, Daniel MEMAIN et Christian TERRANCLE
au Préfet de la Région Occitanie, Préfet de Haute-Garonne au Préfet du Tarn
à la Présidente de la Région Occitanie Pyrénées – Méditerranée
aux Présidents des Conseils Départementaux de Haute-Garonne et du Tarn au Président du CESER Occitanie
Les représentant-es de Solidaires au CESER Occitanie et les syndicats de Solidaires en Occitanie, dont les syndicats SUD-Collectivités Territoriales, directement impliqués dès lors que les collectivités locales sont co-financeurs de ce projet, souhaitent vous interpeller sur le projet inique d’autoroute A69 entre Toulouse et Castres qui fait l’objet d’une contestation majeure.
Dans ce cadre, nombre de nos militant.e.s et adhérent.e.s étaient présents à Saïx, près de Castres le week-end des 22 et 23 avril 2023 pour manifester contre le grand projet inutile et imposé d’autoroute A69.
Notre première remarque sera pour dire que lorsque les forces de l’ordre ne tirent pas des gaz lacrymogènes ou des grenades de désencerclement sur des manifestant·e·s pacifistes, les manifestations deviennent festives et familiales. A Saïx on a joué aux voitures à pédales, on a érigé un mur symbolique en parpaings, dansé dans des concerts ou débattu dans des ateliers. Il ne manquait que la Delorean du film « Retour vers le futur » pour marquer le côté « comique », s’il n’était pas dramatique, que de vouloir imposer un projet directement issu des années 1980 dans les années 2020.
Cette « bonne humeur » est donc parfaitement compatible, pour nos syndicats et ses militant.e.s et adhérent.e.s avec la gravité du sujet qui porte sur l’avenir d’une planète qui puisse rester habitable pour l’humanité.
Elles et ils vous demandent que les investissements publics financent des infrastructures permettant un progrès social et écologique et non celles, pensées dans les années 1980, qui ne prennent pas en compte les enjeux économiques et écologiques du XXIème siècle. S’il fallait l’illustrer, nous pourrions prendre l’exemple de l’eau qui est un sujet majeur pour notre avenir. Si l’Etat et les collectivités territoriales utilisaient les millions d’euros de cette autoroute du passé à la lutte contre les fuites dans les canalisations, leurs investissements auraient cette fois un sens.
Un projet autoroutier pour remplacer une nationale qui a déjà de nombreuses portions à 2×2 voies et qui reste aménageable, par une autoroute à 2×2 voies qui permettrait de gagner 20 minutes (hors embouteillages) et ferait de Castres une banlieue de Toulouse en lui permettant 40 minutes de trajet est un non-sens social et écologique.
Au niveau social avec un prix fixé à 17€ l’aller-retour, on voit que le public ciblé n’est pas celui des travailleur.euse.s au SMIC ou même au salaire moyen, sauf quand ils seront contraints pour des raisons médicales par exemple d’en passer par cette autoroute. En effet, cette autoroute va par ailleurs allonger les trajets « gratuits » et donc contraindre des citoyennes et citoyens d’en passer par le trajet payant en cas d’urgence ou d’obligation.
Les défenseurs vantent un projet de « désenclavement du territoire », de « bassin économique », mais en fait de quoi parle-t-on si ce n’est de permettre aux cadres supérieurs Toulousains de bénéficier d’un air plus pur et d’un immobilier moins onéreux ou pour ceux de Pierre Fabre (principale entreprise défenseuse du projet) de pouvoir vivre ou se rendre à Toulouse.
A part à cela quel serait l’intérêt d’un tel projet ? Le GIEC nous rappelle rapports après rapports qu’il ne faut plus investir dans les modes de transports carbonés. Or, pour l’instant, le parc automobile reste très majoritairement carboné. La voiture électrique, qui deviendra la norme à partir de 2035 peut-elle sauver la voiture individuelle ? Vu son coût de production, d’entretien et le manque de bornes de recharges (ainsi que le manque de Kw de production électrique), ce qui est envisagé est plutôt une réduction du parc automobile, en le cantonnant aux flottes collectives (d’entreprises ou d’autopartage) et à certains usages définis (transport de personnes à mobilité réduite, voitures de luxe…). C’est aussi ce que semble penser le ministre de la transition écologique s’exprimant le 25 avril dernier : «… l’avenir n’est pas à construire des autoroutes et des routes… » .
Dans ce contexte, les financements publics de ce projet autoroutier privé posent particulièrement question :
- 6 millions d’euros pour la Région Occitanie : en totale contradiction avec les ambitions affichées de « Région à Energie POSitive pour 2040 »
- 3,4 millions d’euros pour le Département du Tarn
- 11,5 millions d’euros pour l’État
Sur un budget total de 389 millions pris en charge par le concessionnaire et qui explique le coût élevé du péage prévu. Comment expliquer dans un contexte de réduction budgétaire de l’État, des départements et des régions que de telles sommes soient affectées à un projet néfaste pour l’environnement et qui ne se justifie pas économiquement ?
La Présidente de Région, ainsi que son homologue Président du Conseil Départemental du Tarn, sont assez discrets sur les investissements de leurs collectivités sur ce projet d’un autre âge, comme s’ils étaient gênés. Sans doute la Région Occitanie, en charge des trains TER se rend-elle compte qu’elle pourrait avec 6 millions€ d’investissements facilement augmenter la desserte Toulouse-Castres qui n’offre que 8 trains quotidiens, soit à peine un par heure.
A l’inverse, le Président du CESER a paradé dans la presse locale et nationale pour défendre ce projet.
Le lobbying des entreprises locales ou nationales n’est même pas nié, comme le montre une note d’actualité du CESER transmis à tous les conseiller.ère.s, dont les représentant.e.s de Solidaires, dans laquelle le Président du CESER Occitanie, cite le représentant du CESER qui siège au Comité de suivi de l’A69 mis en place par le concessionnaire ATOSCA ainsi que le groupe Pierre Fabre, 1er employeur du Tarn. Cette note ignore ce que la commission d’enquête a relevé de réserves, comme les revendications légitimes des opposant-es à ce projet que par ailleurs elle montre, comme ses déclarations publiques, sous un jour méprisant et insultant.
Nous citerons pour notre part le communiqué commun daté du 16 avril 2023 par les signataires de l’appel à manifestation du week-end dernier « … La lutte contre l’A69 n’est pas le fait d’écoterroristes affiliés à « l’ultragauche ». Elle est l’expression de la mobilisation de citoyennes et citoyens engagé-e-s, d’habitant-es du territoire, conscient-e-s des dégâts irréversibles que ce projet provoquerait sur la biodiversité, le climat, la perte de surfaces agricoles en contradiction avec toutes les exigences de la période et qui dénoncent les injustices sociales et territoriales qui en résulteraient… »
Quant au respect auquel appelle le Président du CESER, il serait sage qu’il s’en inspire pour lui-même qui n’a de cesse de s’exprimer au nom de l’institution sur nombre de sujets sur lesquels il n’a jamais consulté les conseiller-es. Et il serait tout aussi sage qu’il ne travestisse pas les débats et contenu des avis du CESER, au cas particulier s’agissant précisément de la liaison Toulouse-Castres. L’avis auquel il se réfère voté le 24 mai 2016, mais avec les absentions des groupes CGT, Solidaires et FSU, ne préconise pas la création d’une autoroute mais un aménagement en 2X2 voies ce qui n’est pas du tout la même chose.
Pour être plus précis nous citons ici plusieurs passages de cet avis
« Préconisations … Parmi les chantiers prioritaires à réaliser, notons :…
3- L’aménagement à 2×2 voies à caractéristiques autoroutières de la liaison Toulouse-Castres et son prolongement vers St Pons et Béziers ;… »
Mais aussi :
« … Les priorités territoriales qui se dégagent sont…, la mise à deux fois deux voies du réseau routier pour tous les chefs-lieux de bassins d’emploi,… ».
Ainsi le Président du CESER serait-il avisé de nuancer ses propos au regard des débats et avis de l’institution qu’il préside et du respect de ses membres et de la diversité de leurs avis.
Pour en finir, les représentant-es de Solidaires au CESER Occitanie et les syndicats de Solidaires en Occitanie, rappellent que tout projet d’infrastructure devrait d’ores et déjà être analysé par rapport à son potentiel de propagation de modes de vies qui augmentent les émissions de gaz à effet de serre.
Elles et ils pensent que rapprocher Castres de Toulouse, même si le prix élevé du trajet va limiter le trajet quotidien à une classe sociale élevée, va en imposer le coût aux autres classes sociales et conduira à augmenter l’étalement urbain. Un aménagement du territoire équilibré ne peut se penser en étoile autour des métropoles, car cette pensée qui a émergé dans les années 1960 a montré ses limites en termes de consommation de terres naturelles ou agricoles ainsi qu’en émissions de gaz à effet à de serre.